DR. Khadija AGOUZAL

Hépato Gastro Entérologue
Proctologue et Cancérologue digestif.
Diplômée de la faculté de médecine de Caen, France

Maladies inflammatoires chronique de l’intestin ( MICI)

De quoi s'agit-il?

Ce sont les maladies inflammatoires du tube digestif .Elles sont en nombre de deux : la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique (RCH) .Ce sont des maladies qui évoluent par poussées (c’est-à-dire des crises de durée variables) entrecoupées de rémissions (périodes où la maladie est quiescente ou «endormie»).

Ce sont des maladies responsables d’une inflammation chronique du tube digestif, le but du traitement étant de maintenir une rémission durable et non la guérison.

La maladie de Crohn est caractérisée par une inflammation qui peut intéresser l’ensemble du tractus digestif : de la bouche à l’anus.

La rectocolite hémorragique est caractérisée par une inflammation qui intéresse uniquement la muqueuse rectale et colique.

Quelles en sont les causes?

Ce sont des maladies multifactorielles c’est à dire que jusqu’à aujourd’hui nous n’avons pas trouvé une cause directe à ces deux maladies.

- Cependant nous savons qu’il existe une susceptibilité génétique, en lien avec une mutation NOD2/CARD. Mais ça ne fait pas d’elles des maladies héréditaires!

- Il existe d’autre part une stimulation inadaptée du système immunitaire face à des facteurs environnementaux.

- Il existe une implication du microbiote colique (la flore colonisant notre colon). En effet, chez les patients atteints de ces maladies, l’inflammation colique est responsable d’une dysbiose (c’est à dire un déséquilibre de cette flore) marquée par une augmentation des bactéries pro inflammatoires et une diminution des bactéries « anti-inflammatoires » qui va à leur tour renforcer l’inflammation.

- La prise intempestive d’antibiotiques à un âge jeune, favorise cette dysbiose et donc peut également être un facteur incriminant.

- Des études récentes suggèrent également le rôle de l’alimentation pendant un âge jeune et à l’adolescence : une alimentation riche en sucre, boissons sucrées confiseries,  qui serait associé à une augmentation du risque de développer une MICI.

- Des études expérimentales ont également démontré l’effet néfaste sur la santé des aliments hautement transformés : aliments fabriqués industriellement, enrichis avec des additifs à des fins gustatives. À contrario, une alimentation riche en fruits, légumes et légumineuses serait un facteur protecteur.

- Enfin, le tabac favorise et aggrave la maladie de Crohn

Quels en sont les symptômes ?

La présentation est différente selon qu’il s’agisse de la maladie de Crohn ou de la rectocolite hémorragique

La maladie de Crohn :

La maladie de Crohn peut se manifester par des signes tels que :

  • Douleurs abdominales
  • Diarrhée chronique
  • Sub-occlusion intestinale
  • Anomalies biologiques : syndrome inflammatoire biologique, anémie, carence en fer, carence en vitamine B12…
  • Altération de l’état général
  • Amaigrissement
  • Anomalies du périnée : fistules, fissures, abcès…

La rectocolite hémorragique se manifeste le plus souvent par une diarrhée, rectorragies, émissions glairo-sanglante, faux besoins .

Les Mici peuvent également avoir des manifestations extra digestives : manifestations articulaires, cutanées ou oculaires.

Quelles en sont les complications ?

Les complications peuvent également être un mode de découverte de ces maladies

En ce qui concerne la maladie de Crohn :

Fistules digestives (communication entre un segment de l’intestin et une autre structure : vessie…), syndrome occlusif ,abcès ,perforation , péritonite .

Concernant la rectocolite hémorragique


Colite aigüe grave (inflammation aigue de la muqueuse colique) rectorragies, dilatation importante du colon, perforation et péritonite.

Des poussées consécutives sans traitement peuvent engendrer une destruction de la paroi intestinale , ainsi les segments intestinaux peuvent alors ne plus remplir leur fonction.

Comment diagnostic t-on ces 2 maladies ?

Le diagnostic de ces maladies repose sur un faisceau d’arguments : cliniques, biologiques, endoscopiques, anatomopathologiques et radiologiques.

Le diagnostic peut être évoqué par un long passé de troubles intestinaux associé à des anomalies des paramètres biologiques : syndrome inflammatoire, anémie, carence vitaminique, ce qui nous poussent à réaliser des examens endoscopiques (fibroscopie oeso-gastro-duodénale et la coloscopie).

Des anomalies de la muqueuse intestinale lors de l'endoscopie  pourraient nous orienter vers le diagnostic mais dans la plupart des cas ces anomalies ne sont pas spécifiques. Des biopsies ciblées, suivie de l’analyse anatomopathologique peut également nous orienter mais encore une fois , dans une majorité des cas les biopsies peuvent ne pas être concluantes.

Y a t’-il un traitement efficace ?

Je rappelle que le traitement a pour but de maintenir la maladie en rémission c’est à dire de la rendre asymptomatique sur le plan clinique, biologique, et endoscopique et d’éviter les poussées. Il s'agit de maladies chroniques, c’est à dire qu’il n’y a pas de guérison.

Le traitement des poussées et des crises diffèrent en fonction des signes de gravités. Mais il repose le plus souvent sur la prise de corticoïdes.

En fonction de l’évolution, la prise en charge nécessite souvent un traitement dit d’entretien empêchant « le réveil » de la maladie.

Le principe du traitement d’entretien est d’agir sur les différents acteurs du système immunitaire : inhiber les molécules pro-inflammatoires du système immunitaire .Plusieurs molécules sont actuellement utilisées : les immunosuppresseurs, les anti-TNFalpha , les anti-intertleukines, les anti intégrines , les inhibiteurs des Janus Kinases ( non commercialisés au Maroc)

Qu’en est-il de la chirurgie ?

Elle est réservée aux cas :

  • Résistants au traitement médical malgré les différentes lignes de traitement qui peuvent être proposés
  • Aux formes compliquées

A noté que la résection du segment digestif atteint ne vous met pas à l’abris d’une récidive sur un autre segment

Dois-je garder le traitement à vie ?

Le message important à retenir c’est qu’il ne faut en aucun cas arrêter le traitement de soi-même !!

Il s’agit d’une décision à prendre avec votre Gastro Entérologie ! L’arrêt du traitement se fait généralement après une longue période de rémission sous traitement, et une fois que l’ensemble des voyants (cliniques, biologiques et endoscopiques) sont au vert.

Que se passerait t’-il si je ne prenais pas mon traitement ou si je l’arrêtais spontanément ?

Un arrêt du traitement peut engendrer une poussée .Il faut également avoir à l’esprit que la gravité d’une poussée n’est pas prévisible, et qu’elle peut aller d’une simple douleur ou diarrhée à une complication qui peut entraîner une hospitalisation.

Quels sont les bienfaits du traitement ?

  • Amélioration des symptômes digestifs et extra digestifs
  • Éviction des poussées
  • Reprise du poids
  • Amélioration de la qualité de vie et reprise d’une vie active

Quant est-t -il du suivi ?

Il faut savoir que ce sont de maladies qui évolue par poussées-rémissions et que la survenue d’une poussée est imprévisible et qu’elle peut subvenir même sous traitement. La surveillance de l’efficacité du traitement est essentielle. Généralement quelques mois après l’instauration du traitement, le médecin propose la réalisation d’examens complémentaires pour s’assurer que le traitement est efficace.

Par la suite et de manière régulière votre médecin vous proposera des examens de surveillance, biologique, endoscopiques et /ou radiologique.

Faut-il suivre un régime alimentaire?

Il n’y a pas de régime au sens propre du terme.

Pendant les poussées on peut vous prescrire de manière temporaire un régime sans résidus

En cas de sténose (rétrécissement de la lumière intestinale) on peut vous déconseiller de prendre des aliments riches en fibres qui peuvent pelotonner et entraîner des « bouchons » à l’origine de syndrome occlusif

En dehors de ces circonstances particulières, il n’y a pas de régime proprement dit !! Il est essentiel d’éviter les aliments ultra transformés.

L’éviction du tabac est important pour une bonne cicatrisation

Cependant les aliments mal tolérés peuvent être évités tout en gardant une alimentation dite « plaisir ».

Peut-on faire du sport  ?

Il est conseillé de garder une activité physique régulière : 30 minutes environ par jour.

Des pratiques sportives tels que le yoga la méditation consciente, peuvent aider à gérer le stress et les incommodités liés à la maladie.

Existe t-il une médecine alternative ?

Des études Chinoises récentes suggèrent que l’acupuncture en association avec le traitement peut aider , à améliorer les symptômes et à la cicatrisation muqueuse .Mais bien évidemment, ces alternatives ne remplacent en aucun cas les traitements médicamenteux.